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Le chat pétrifié

2/9/2013

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C'était un très vieux chat. Mais comme tous les matous, il se montrait d'une incurable curiosité. Examinant et furetant perpétuellement dans son entourage, qu'il appartienne aux hommes ou à la nature. Son maître était un magicien appelé Parafaragamus, vivant seul dans un donjon reculé, dernier vestige d'un château détruit par le temps et la folie des hommes. 

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Par MoonCCat

L'ermite y conduisait de mystérieuses expériences, faites de fumée, de combustions multicolores et de mélanges d'ingrédients étranges dans un laboratoire en clair obscur. 
Le chat avait vaguement aperçu une chose encore plus étonnante que les autres, en trottinant un jour sur les traces de son maître... Alors que Parafaragamus descendait dans les souterrains et entrait dans une des nombreuses caves, protégée par une lourde porte en chêne plus épaisse que les autres, le chat était certain d'avoir aperçu un livre de la taille d'un homme, avant que la porte ne se referme sur ses moustaches ! 
Mais le magicien prenait bien soin, chaque fois qu'il entrait dans ce lieu crépusculaire et mystérieux, d'empêcher son matou curieux de le suivre. Ce n'était pas faute d'essayer d'entrer mais le magicien lui disait chaque fois : "Ouste, ce n'est pas un spectacle pour les chats ! Va donc chasser des souris ! Elles grignotent mes précieux parchemins !".

Parfois la nuit, on entendait des coups sourds résonner dans la cave, ce qui ne manquait pas d'étonner le chat, qui se posait de plus en plus de questions.
Puisqu'un livre ne bouge pas, qui ou quoi pouvait bien être à l'origine de ces bruits nocturnes ? Un fantôme ? Une entité issue des éthers, comme celles que son maître avait coutume de convoquer la nuit ? Il savait bien que ces formes transparentes qui apparaissaient soudainement dans un halo bleuté étaient capables de parler, alors peut-être étaient-elles capables aussi de cogner contre les murs ? C'est une question qui revenait souvent hanter les pensées du matou.
Surtout que Parafaragamus descendait à la cave chaque jour au coucher du soleil. Pugnace, le chat lui emboîtait le pas, la queue en forme de point d'interrogation, espérant à chaque fois déjouer la vigilance du magicien et ainsi apercevoir le grand livre. Mais en vain.
 
Une fois, le chat avait même vu Parafagamus descendre avec plusieurs lourdes chaines et trois gros cadenas, faits d'un alliage métallique (que le magicien avait lui même fabriqué dans son creuset, au terme d'une interminable chauffe digne de la marmite de l'enfer !). Ce jour-là, un grand remue ménage avait secoué les fondations du donjon comme si un combat fabuleux entre deux bêtes avait lieu.
Parafaragamus avait scandé des imprécations incompréhensibles encore plus impressionnantes que d'habitude, les cadenas et les chaines avaient certainement été projetés sur les épais murs de pierre et un cri strident avait retenti à plusieurs reprises.
Finalement, le calme était revenu et le magicien était sorti de la cave avec sa toque en astrakan posée de travers sur le chef, et l'étoffe de la robe déchirée en plusieurs endroits. Le chat, assis juste en face de la porte, avait alors remarqué que son maître semblait épuisé et soucieux.
Il lui avait dit : "Ah ça ! Prends bien garde de ne jamais entrer ici ! Tu le regretterais amèrement mon cher matou !". Mais la curiosité du chat était la plus forte et il s'était toujours juré de découvrir le secret de la pièce interdite.

Alors, le chat avait imaginé un ingénieux stratagème pour y accéder enfin. Alors que Parafaragamus y était enfermé un soir, le matou avait poussé de toutes ses forces un petit boulet de canon entreposé au sol contre un vieux coffre sombre. Il l'avait patiemment fait rouler jusqu'au sommet de l'escalier qui menait aux souterrains et, d'un dernier coup de patte, l'avait fait basculer.
Le boulet s'était mis à dégringoler l'escalier, causant un vacarme de tous les diables, roulant et chutant sur chaque marche comme l'aurait fait le pas lourd d'un guerrier en armure.
Le chat s'était précipité à sa suite et ce qu'il escomptait arriva : alerté par le chahut, Parafaragamus ouvrit la porte de la pièce interdite et sorti dans le souterrain. Profitant de sa surprise, le chat s'engouffra dans l’entrebâillement de la porte à la vitesse de l'éclair.
Ce qu'il découvrit dépassa alors tout ce qu'il avait pu imaginer. Le grand livre était encore plus grand que Parafaragamus, le dépassant de deux pieds. Il était littéralement enchaîné et bougeait, comme animé par une force extérieure. Sa couverture rouge sang semblait vivante, comme si un réseau sanguin irriguait son cuir.
Mais alors que le chat commençait à sentir la peur envahir ses moustaches, les chaines et les cadenas cédèrent d'un seul coup et le livre s'ouvrit brutalement. Le chat eu juste le temps d'apercevoir les traces d'une connaissance interdite sur les grandes pages parcheminées, avant d'être changé en pierre.
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